jeudi 8 décembre 2011

Que Dieu ait pitié de nous...

Dieu qu'il est difficile d'être femme en ces temps de "printemps" ou "révolution" arabes! Dieu que c'est difficile, tout court..Avant, après, pendant....
Comme si  le coeur des discours religieux ne pouvait battre qu'à l'orée des fantasmes féminins.
Comme si la femme était LE problème, le seul, l'unique. Celle par qui tout péché arrive et par qui toute expiation devrait passer.
Comme si nous étions les symboles du mal. Du mal absolu mais aussi de la beauté, de la tentation, du haram... Awa et le péché originel....
Mémoires perclues de nos islamistes New Age qui mêlent tous les non dits, les frustrations.
"Printemps" après "printemps", femmes, nous nous retrouvons dans les modélisations d'espaces socio culturels qui se construisent à la hauteur des fantasmes projettés sur la femme.
Il ne suffit pas de nous couvrir. Il faut nous "tuer" symboliquement, nous cantonner aux rôles qui nous sont présupposés dévolus : mères, gardiennes d'un ordre patriarcal, femmes, vertus, dignité, pudeur, honneur...
Cachez donc ces corps qui ne sont que tentation pour les hommes ! Voilez! Enfermez! Niez!
Effacez donc toute trace de l'humanité féminine pour que les hommes se sentent enfin "libres" !
Dans certains pays on lapide. Dans d'autres on flagelle. Dans d'autres on entame le processus de négation des femmes, avec l'assentiment et le consentement de certaines femmes.
Dans d'autres pays, encore, on tue les bébés filles à la naissance.
Petit à petit la parole religieuse présentée comme réformatrice ( les nouveaux barbus se désignent eux mêmes comme Islamistes Réformateurs) s'insère partout.
La femme est devenue le symbole de tous nos maux. Comme si la vue d'une femme dévoilée avait un impact économique! ou bien, comme si la femme jouissant des mêmes droits que l'homme était un frein au développement!
On entend les nouveaux discours qui indexent ce qui a fait la beauté de nos civillisations arabo musulmanes.
Il faut effacer la poésie, la poésie amoureuse.
Eradiquer le Ghazal, ce poème d'antan, où le poète chantait l'amour et la liberté, la beauté des femmes et la séduction comme lien social de désir.
Eradiquer le Rubbayyat, ce quatrain délicieux venu des mémoires persannes.
Eradiquer la musique et la poésie profane.
Eradiquer l'amour....
Oublier que la poésie arabo musulmane est l'une des plus belles poésies du monde! Avec la femme comme objet central, la reconnaissance de la femme en tant qu'égal de l'homme.
Aujourd'hui un Djalal od Din Rumi serait décapité en place publique. Un Abu Nawass, délicieusement pervers et amoureux des hommes, serait lapidé, insulté, égorgé...
Un Nizzar Kabbani serait brûlé....
Alors, en souvenir de ces temps anciens où les barbus n'avaient pas encore gagné et où l'homme se reconnaissait à l'aura des femmes, ces rubbayyat de Djalal od Din Rumi  ( 13 °siècle):

"J'ai couru au jardin et j'ai cueilli une rose.
Je craignais d'être vu par le jardinier.
J'entendis la voix du jardinier me dire:
Qu'est-ce qu'une rose, je te donnerai la roseraie."

"En souvenir de ta lèvre, je baise le rubis de ma bague;
N'ayant pas celle-là, je baise celui-ci.
Ne pouvant atteindre ton ciel,
je me prosterne et je baise la terre."
Dieu qu'il est difficile d'être femme!
Que Dieu ait pitié de nous....

Salomé.


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